20 propositions pour une meilleure reconnaissance de vos compétences de mandaté

Sommaire

Jean-Dominique Simonpoli, directeur général de l’association Dialogues, a soumis à la ministre du Travail 20 propositions pour valoriser les compétences acquises par les représentants du personnel et les mandataires syndicaux. Pas de révolution en vue mais des ajustements précis et judicieux qui contribueraient à rendre plus efficaces les mesures et dispositifs réglementaires déjà en vigueur. 

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Crédit : ministère du Travail

L’ancien secrétaire général de la fédération CGT des banques et assurances a produit en quelques semaines un rapport sur « La reconnaissance et la valorisation des compétences des représentants du personnel et des mandataires syndicaux », livré à la ministre du Travail ce 3 août 2017.

Le rapporteur rappelle en guise d’introduction les éléments clefs du paysage français du syndicalisme et de la représentation du personnel (760 000 mandat pour 600 000 mandatés aux profils variés), les apports des lois successives, depuis 2008 notamment, dans le sens d’une plus grande valorisation des compétences acquises pendant le mandat et en particulier au sein même de l’entreprise. Il relève que les plus grandes avancées en la matière se sont faites au niveau d’accords d’entreprise et plus rarement au niveau des branches.

Il émet ensuite 20 propositions dans le but de renforcer les mesures déjà prises et de mieux valoriser encore ces salariés qui sacrifient d’une certaine manière une partie de leur vie professionnelle (et parfois personnelle) pour défendre les droits de leurs collègues.

Voici les 20 propositions avancées par Jean-Dominique Simonpoli.

  1. Obligation d’adaptation du mandaté à un poste de travail

« L’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail », c’est ce que dit l’article L6321-1 du code du travail. Il est proposé d’élargir ce droit aux salariés exerçant un mandat syndical dans l’entreprise et de leur appliquer également l’obligation de suivre les actions de formation proposées par leur employeur.

  1. Faire respecter la loi sur la formation des salariés

Les salariés mis à la disposition d’une organisation syndicale ont accès aux formations leur permettant de maintenir leur employabilité au même titre que les autres salariés. Cependant, n’étant pas présents physiquement sur un poste de travail en entreprise, ils ne sont pas sollicités pour les suivre et manquent ainsi une occasion de s’assurer un retour serein vers un emploi le jour de la fin de leur mandat. Le rapporteur propose ainsi de clarifier cette obligation concernant ces salariés au statut particulier et d’imposer aux employeurs de les former.

  1. Rendre obligatoires les entretiens de début et de fin de mandat

La loi Rebsamen du 17 août 2015 a introduit l’entretien de début et de fin de mandat, en laissant aux personnes concernées la liberté de les mettre en place.
Le rapporteur propose donc de rendre obligatoire la tenue de ces entretiens.

  1. Généraliser les entretiens de début et de fin de mandat

La même loi du 17 août 2015 réserve ces mêmes entretiens de début et de fin de mandat, aux mandatés en délégation au moins 30 % de leur temps de travail.
Jean-Dominique Simonpoli relève, comme l’on fait d’autres acteurs du monde syndical et RH, l’imperfection de cette mesure qui met de côté tous ceux qui n’ont pas de « gros mandat » mais consacre pourtant une bonne partie de leur vie professionnelle et personnelle à leur engagement.
Il propose donc d’élargir à tous les mandatés la tenue obligatoire de ces entretiens.

  1. Prévoir un entretien d’anticipation de la fin de mandat

L’entretien de fin de mandat, tel que le prévoit la loi, se déroule après la fin du mandat. Or, s’il permet « de recenser les compétences au cours du mandat et de préciser les modalités de valorisation de l’expérience acquise », sa date de tenue ne permet pas d’anticiper l’avenir du salarié concerné au sein de l’entreprise.
Jean-Dominique Simonpoli propose de créer un entretien préalable à l’entretien de fin de mandat, qui permette d’en anticiper les conséquences.

  1. Co-construire des dispositifs de valorisation

S’appuyant sur plusieurs accords d’entreprise, le rapporteur propose d’encourager la construction commune entre direction et syndicat ou au niveau de la branche, de dispositifs de valorisation des compétences des mandatés syndicalistes. Les moyens ne sont pas précisés.

  1. La BDES : un outil anti-discrimination

Le rapport propose, pour les entreprises de plus de 300 salariés (pourquoi un seuil si élevé ?), d’inclure des données permettant de comparer les évolutions de carrière des élus du personnel avec celles des autres salariés de l’entreprise. Un outil anti-discrimination syndicale ?

  1. Favoriser la négociation de branche et la représentation de mandatés issus des TPE-PME

Le rapporteur rappelle que le projet de loi d’habilitation à prendre par ordonnances prévoit des cas dans lesquels la branche peut faire primer son accord sur les accords d’entreprise. Dans ce champ, on trouve « les conditions et les moyens d’un mandat syndical, la reconnaissance des compétences acquises et les évolutions de carrière ».

La proposition n°8 consiste donc à favoriser la négociation au niveau des branches en présence de mandataires syndicaux issus des TPE et PME. Une représentation qui serait financée par une quote-part de la cotisation de l’entreprise à la branche.

  1. Aider les TPE et PME dans les négociations collectives

L’idée, à l’échelle de la branche, est de mettre à la disposition des entreprises qui n’en ont pas les moyens, des binômes d’experts (anciens syndicalistes, DRH, etc.) chargés de les accompagner. Le financement serait assuré par l’AGFPN, fonds pour le financement du dialogue social mis en place en 2015.

Quelle articulation alors avec les CPRI mis en place dans les régions ?

  1. Fusion des branches. La valorisation des IRP : un critère qualitatif de choix

La fusion des branches professionnelles est un projet gouvernemental. Jean-Dominique Simonpoli propose d’inclure dans les critères de sélection d’un accord de branche, la prise en compte de la valorisation des compétences des mandatés et représentants syndicaux.

  1. Priorité aux formations communes sur l’économie et le social

L’article 33 de la loi Travail ou loi du 8 août 2016 prévoit la mise en place de formations communes aux acteurs du dialogue social au niveau de l’entreprise. L’Intefp (Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle) a été chargé d’élaborer le cahier des charges correspondant.

Le rapporteur incite l’Intefp à inclure en priorité dans son cahier des charges les thématiques économiques et sociales. Des connaissances qui contribuent à une meilleure compréhension du contexte d’une entreprise.

  1. Valoriser la formation des managers au dialogue social

Les managers étant des éléments essentiels dans une entreprise, en prise directe avec les délégués du personnel notamment, le rapporteur préconise de valoriser les actions des branches et des entreprises en faveur de la formation des managers au dialogue social.  « Le financement de ces formations serait assuré par les Opca ou inscrits dans les plans de formation des entreprises. » (lire l’avis de René Bagorski, directeur chargé du suivi des Opca à l’AFPA et professeur au Cnam).

  1. Faire contribuer les syndicats à la formation de leurs militants en reconversion

Après avoir rappelé le fonctionnement de l’AGFPN qui gère les fonds dédiés au dialogue social, le rapporteur suggère que les syndicats participent au financement des parcours de leurs militants au travers d’un abondement au CPF. L’abondement serait limité à une durée minimale en termes de mandats et plafonnée à 200 heures par personne.

  1. Négocier des heures de formations supplémentaires au niveau de l’entreprise

Dans le cadre de la fusion des instances représentatives du personnel, il pourrait être envisagé d’obliger (ce n’est pas précisé dans la proposition) chaque entreprise à ouvrir des négociations pour parvenir à un accord collectif sur un pourcentage (supplémentaire ?) des heures de délégation consacré à la formation des représentants du personnel et aux formations communes prévues par l’article 33 de la loi Travail.

  1. La CGE désignée pour créer un label « entreprise certifiée dialogue social »

Il est proposé à la Conférence des Grandes Ecoles de mettre en place, avec le Haut Conseil du dialogue social, un label « entreprise certifiée dialogue social » à l’attention des managers, dirigeants d’entreprise et représentants syndicaux. Le but est de sensibiliser ces acteurs aux enjeux du dialogue social.

  1. Renforcer les connaissances des CEP pour mieux accompagner les mandatés

Le rapport propose également de compléter la formation des conseillers en évolution professionnelle (CEP) créés par la réforme de la formation professionnelle en 2014, par des formations relatives aux titulaires de mandats de représentants du personnel ou de mandatés syndicaux. Le but étant d’avoir des personnes suffisamment outillées pour pouvoir accompagner efficacement ces publics particuliers au moment de leur reconversion.

  1. Une nouvelle mission pour l’AFPA : les mandats hors de l’entreprise

Rappelant l’existence du groupe de travail piloté par la DGEFP en cours d’élaboration d’une liste de compétences acquises par les mandatés pour les concrétiser sous forme de certifications, Jean-Dominique Simonpoli, propose qu’après avoir établi cette liste pour les mandats « dans » l’entreprise, une mission soit dédiée ensuite à élaborer un référentiel de compétences des mandatés « hors » de l’entreprise et des branches : au conseil des prud’hommes, dans les organismes paritaires, mutualistes, les confédérations syndicales, etc.

  1. Un bilan de compétences pour les mandatés hors branche et hors entreprise

Malgré quelques dissensions entre membres syndicalistes du groupe de travail de la DGEFP, il a été décidé de séparer les compétences acquises au cours d’un mandat dans l’entreprise de celles acquises hors entreprise. Le rapporteur propose ainsi de créer un bilan de compétences spécifique aux mandatés qui exercent hors branches et hors entreprises.

  1. Valoriser l’accès à la fonction d’inspecteur du travail pour les mandatés

    Les syndicalistes qui cumulent huit ans de mandat ont un droit d’accès au troisième concours de l’inspection du travail (article 5 du décret du 20 août 2003). 5 à 10 % des emplois à pourvoir sont réservés aux candidats de cette voie. Le rapport propose de « mieux valoriser » cet accès au concours d’inspecteur du travail auprès des titulaires de mandats syndicaux.

    Par quels moyens ?

     

  2. Modification du rôle et de la composition du Haut Conseil au dialogue social

Présidé par le ministre du travail, instance paritaire avec voix délibératives, le Haut Conseil rêvé par Jean-Dominique Simonpoli serait chargé de « proposer aux pouvoirs publics des expérimentations et des préconisations relatives au dialogue social au niveau local, territorial et national ». Cet organe, qui pourrait consulter les présidents de tous les organes de l’Etat (de l’Assemblée nationale à France stratégie), financé par les fonds de l’AGFPN, servirait donc de veille et d’animateur des actions autour du dialogue social en France.

Philippine Arnal-Roux 

A NOTER dans votre agenda :

Jean-Dominique Simonpoli sera invité à intervenir lors de la journée du 23 novembre prochain « Les Relais 2017 du dialogue social et de la formation ».

A cet événement placé sous le haut patronage du ministère du Travail bénéficiera également de la présence d’Antoine Foucher, directeur du cabinet de Mme Pénicaud.

A CONSULTER :

Le rapport complet de M. Simonpoli rendu le 3 août 2017 à Mme Pénicaud.

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