Ordonnance n°6 : confirmation de l’esprit du nouveau code du travail

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Parue le 21 décembre 2017, l’ordonnance n° 2017-1718, appelée aussi ordonnance n°6, vient renforcer le pouvoir du conseil d’entreprise et renvoie la quasi-totalité des thèmes de négociation à l’échelle de l’accord d’entreprise.

ordonnance_macron n°6La sixième ordonnance réformant le code du travail corrige les cinq précédentes, parues le 23 septembre dernier et précise plusieurs points en suspens, hormis ceux que des décrets d’application ont défini ou devront définir.

 

Le conseil d’entreprise peut négocier sur tous les thèmes

Les « ordonnances Macron » ont donc créé une nouvelle instance de représentation du personnel, le comité social et économique (CSE) en fusionnant les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le CHSCT. Elles prévoyaient également la création d’un conseil d’entreprise par les employeurs qui voudraient également réunir les délégués syndicaux, seuls représentants du personnel à pouvoir négocier dans l’entreprise jusque-là. Ce conseil d’entreprise a donc la mission de négocier, conclure et réviser les conventions et accords d’entreprise, à l’exception des accords soumis à des règles spécifiques de validité, comme les accords sur le PSE (plan de sauvegarde de l’emploi) ou le protocole d’accord préélectoral.

L’ordonnance n°6 modifie ce dernier point en accordant au conseil d’entreprise la possibilité de négocier sur tous les types d’accords (article L.2321-1 du code du travail).

En conséquence, on peut se demander si le conseil d’entreprise, quelle que soit sa composition, ne va pas, à terme, se substituer totalement aux délégués syndicaux pour négocier et surtout conclure des accords.

 

Ordonnance n°6… La condition des 12 mois consécutifs ou non

Jusqu’à présent, la condition pour organiser des élections professionnelles était le dépassement d’un seuil d’effectif (11, 50, 200, 300) sur 12 mois consécutifs ou non ; ce qui permettait aux salariés de réclamer des élections dès que le seuil était passé et malgré les variations d’effectifs. Désormais (article L2143-3), avec l’ordonnance Macron n°6, la condition d’effectif de 50 salariés doit être remplie sur 12 mois consécutifs, ce qui veut dire que la balle est maintenant dans le camp de l’employeur. Il suffira qu’il y ait 49 personnes sur un mois pour ne pas avoir à remplir cette obligation.

 

Le nombre de membres du CSE fixé par accord d’entreprise

Dans l’ordonnance n°2 publiée le 23 septembre, le nombre de membres du CSE pouvait être augmenté par accord d’entreprise. La nouvelle ordonnance dite « balai », prévoit désormais que le nombre de membres du CSE pourra être modifié à la hausse ou à la baisse par accord d’entreprise. En revanche, le nombre global d’heures de délégation ne pourra pas être modifié (voir l’article sur le décret qui annonce les nombre d’élus et leurs heures de délégation).

 

Le temps de délégation pour les questions de santé : au bon souvenir du CHSCT

Alors que rien n’était prévu dans l’ordonnance du 22 septembre sur les heures de délégation consacrées aux questions de santé, sécurité et conditions de travail, la nouvelle ordonnance reprend un bout de l’article 4614-6 du code du travail (ancien) en précisant que le temps passé par les membres titulaires de la délégation du personnel du CSE à « la recherche de mesures préventives dans toute situation d’urgence et de gravité, notamment lors de la mise en œuvre de la procédure de danger grave et imminent » est décompté comme du temps de travail effectif et n’est donc pas déduit des heures de délégation.

En revanche, les deux autres actions non déduites des heures de délégation mentionnées dans l’ancien article, ne sont plus mentionnés, soit : le temps passé en réunion pour les questions de SSCT (on suppose que c’est le temps de réunion consacré au CSE)  et le temps passé en enquêtes menées après un accident du travail grave ou des incidents répétés ayant révélé un risque grave ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave.

 

Marche arrière sur les consultations au sein du CSE

Alors que les ordonnances d’origine enlevaient toutes les anciennes consultations du CE au CSE à partir du moment où un accord d’entreprise existait sur le thème, la 6e ordonnance réaffecte au comité social et économique les pouvoirs consultatifs de l’ancien comité d’entreprise, excepté sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

 

Contrôle de la mise en place d’une CSSCT dans une entreprise de moins de 300 salariés

Dans l’ordonnance de septembre, la mise en place d’une commission santé, sécurité et conditions de travail dans une entreprise de moins de 300 salariés pouvait être imposée à l’employeur par l’inspecteur du travail. La nouvelle ordonnance de décembre ajoute l’obligation à l’inspecteur de soumettre sa décision au directeur de la Direccte, son supérieur hiérarchique. Ce qui, de l’avis d’inspecteurs du travail eux-mêmes remet en cause l’indépendance de leur fonction.

 

Mise en place du CSE, remise à zéro des compteurs pour les accords

Il est précisé que dès que le comité social et économique est mis en place dans une entreprise, tous les accords jusque-là conclus deviennent caducs et doivent donc être renégociés.

Il est à noter qu’une septième ordonnance devrait paraître avant le 15 mars 2018 au sujet du travail détaché.

 

Philippine Arnal-Roux

 

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