VAE militante. « C’est aux organisations syndicales d’agir » Stéphanie Moullet, IRT AMU

IRT Université Aix Marseille

La formation et le diplôme permettent aux militants de valoriser et de faire reconnaître leur expérience. Crédits : AMU site du Ministère de l’Éducation nationale.

Le lancement en 2010 par l’IRT d’Aix-Marseille, avec les organisations syndicales, d’une session de deux jours pour sensibiliser les militants syndicaux au dispositif de VAE militante n’a attiré que 16 candidats. Conviction et enthousiasme des acteurs de ce projet n’ont pas suffi, pour quelles raisons ?

« La validation des acquis de l’expérience est dans la bouche de tous les syndicalistes. Ils sont tous enflammés à cette idée car la perspective d’une VAE militante promet des possibilités de sortie, de reconversion pour les élus après un mandat qui est forcément limité dans le temps » explique Stéphanie Moullet, maîtresse de conférence à l’IRT Aix-Marseille. « Tout le monde est d’accord sur le fait que la VAE est un moyen d’attirer des jeunes, de renouveler les équipes, alors que le syndicalisme est dans une période difficile en termes de recrutement ».

Forts de cet enthousiasme, en 2010, l’IRT de l’université et trois organisations syndicales régionales (CFDT, CGT, FO) ont réfléchi ensemble à la mise en place d’un module de deux jours qui explique ce qu’est une VAE, quels sont les diplômes et les passerelles accessibles aux militants. Alors que les trois organisations étaient partantes et qu’elles portent aujourd’hui encore le même discours, dans les faits, seule la CGT a inscrit ce module dans son programme de formation. Résultat : beaucoup de sessions ont été annulées faute de participants et sur ceux qui ont suivi ce module, soit 16 militants, « aucun n’a véritablement embrayé sur une VAE » regrette Stéphanie Moullet. (lire son interview).

 

Sur la VAE militante, c’est aux organisations syndicales d’agir

« Le constat, à notre échelle régionale, est que ceux qui font une VAE, la mènent seul, sans l’aide de leur organisation syndicale (OS), sans doute parce qu’il s’agit d’une démarche très personnelle. Il est vrai que nous sommes les mieux placés pour faire l’interface, concède la maîtresse de conférence. Pourtant l’IRT n’a ni la vocation ni les moyens de poursuivre cet objectif de VAE militante. La sensibilisation a été faite, ensuite c’est aux organisations syndicales d’agir. Il est vrai qu’elles sont sur tous les fronts et que les interventions et négociations deviennent de plus en plus techniques, mais pour le renouvellement des générations de militants, l’absence d’action en faveur de la VAE est dommageable pour les OS. »

 

Transformer son expérience de militant en diplôme

Pour Emilie Cantrin, permanente de la CGT (lire son interview), aujourd’hui détachée à temps plein au Conseil régional de la CGT depuis juin 2014, et qui a participé à la création du module sur la VAE militante, « l’idée est toujours bonne », mais il y a effectivement un problème : deux sessions seulement se sont tenues, essentiellement assurées pour des militants CGT et le dispositif vivote. Les causes ? Un manque de soutien de la part de la Centrale, pas de mot d’ordre national au sujet de la VAE militante, une communication régionale faible et non coordonnée, mais aussi un problème d’accompagnement des militants vers une démarche de validation des acquis de l’expérience, pas si évidente à mener.

« En pratique, un militant a tendance à s’occuper plus des autres que de lui-même et il n’est pas évident pour lui de transformer son expérience en diplôme », explique Emilie Cantrin. « Comment un ouvrier à un poste d’exécutant, après avoir fait une VAE, pourrait-il prétendre revenir dans son entreprise à un poste au service RH ? Comment arriver à se réinsérer dans l’entreprise après plusieurs années de mandat, à mi-temps ou plein temps ? ». La reconnaissance par le haut des compétences militantes est en effet difficile à appliquer dans la réalité du monde du travail. C’est toute la difficulté à laquelle sont confrontés les militants qui vont au bout de la démarche de VAE et on imagine la volonté nécessaire qu’elle implique.

 

Philippine Arnal-Roux