Heures de délégation hors temps de travail : quelles limites ?

Sommaire

Les représentants du personnel ont le droit de poser des heures de délégation en dehors de leurs horaires contractuels de travail. Cependant cela doit se faire sous certaines conditions comme l’a rappelé la cour de cassation dans un arrêt récent.

 

heures de delegationRembourser à son employeur le paiement de ses heures de délégation : c’est ce que risque de devoir bientôt faire un représentant du personnel de Transdev Ile-de-France. Son employeur, à l’origine de la demande, vient en effet d’obtenir gain de cause auprès de la cour de cassation, dans un arrêt rendu le 14 octobre 2020.

 

 

 

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Peut-on poser ses heures de délégation les dimanches et jours fériés ?

Entre 2013 et 2015, ce représentant du personnel, alors élu au CE et au CHSCT, avait en effet utilisé ses heures de délégation les dimanches et jours fériés, c’est-à-dire en dehors de son horaire normal de travail. Il avait ensuite perçu le paiement de ces heures comme heures supplémentaires.

Heures de délégation et heures supplémentaires

Si le code du travail pose le principe selon lequel le temps passé en délégation est de plein droit considéré comme temps de travail (article L2315-10), la jurisprudence a depuis longtemps précisé que lorsque les heures sont utilisées hors du temps de travail, elles doivent être rémunérées comme des heures supplémentaires. Elles ouvrent donc droit à une majoration et à un repos compensateur, selon les règles en vigueur dans l’entreprise.

Par ailleurs, les éventuelles majorations que perçoit un représentant du personnel en raison de ses horaires habituels de travail (s’il travaille de nuit ou le week-end, par exemple) doivent également lui être versées pour le paiement des heures de délégation, même si celles-ci ont été utilisées sur des périodes non concernées par ces majorations (la journée ou la semaine dans notre exemple).

 

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Les nécessités du mandat à justifier

Dans l’affaire jugée, l’employeur ne contestait pas l’usage de ces heures — elles ont bien servi à l’exercice des mandats —, mais il affirmait que l’élu n’avait pas apporté la preuve de la nécessité de les poser hors de son temps de travail. Le représentant du personnel arguant pour sa part que le manque d’effectif chronique ne lui permettait pas de s’absenter de son poste les autres jours sans perturber le fonctionnement de son service.

Insuffisant selon la Haute cour qui, conformément à la jurisprudence antérieure, rappelle qu’il appartient au représentant du personnel, qui décide de prendre ses heures de délégation en dehors de son temps de travail, de le justifier par les nécessités de son mandat. Un élu qui travaille habituellement de nuit pourra par exemple faire valoir qu’il doit rencontrer des salariés la journée pour être en mesure d’exercer son mandat.

Remarquons que le salarié avait mis en avant les difficultés qu’il rencontrait pour exercer son mandat sur son temps de travail. Ces difficultés ne suffisent donc pas à justifier la nécessité de poser des heures de délégation hors du temps de travail, mais il n’en reste pas moins que l’employeur doit permettre effectivement aux représentants du personnel d’exercer leurs mandats.

 

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Rappelons qu’un accord collectif doit déterminer les mesures à mettre en œuvre pour concilier la vie professionnelle avec la carrière syndicale (article L2141-5 du code du travail) et que les élus peuvent solliciter un entretien de début de mandat portant sur les modalités pratique d’exercice du mandat au regard de l’emploi occupé.

Enfin, la cour de cassation a déjà jugé que l’employeur devait adapter les objectifs d’un salarié mandaté en fonction des « seules heures consacrées à l’exécution de ses obligations contractuelles » (arrêt du 6 juillet 2010).

 

L’employeur doit payer avant de contester

L’employeur qui conteste l’utilisation d’heures de délégation (qu’elles soient posées sur le temps de travail ou en dehors) doit tout de même les payer à l’échéance normale. Ce n’est qu’ensuite qu’il peut solliciter leur remboursement devant le conseil des prud’hommes. Il doit également avoir préalablement demandé au salarié des précisions sur l’usage de ces heures.

Dans ce cas le représentant du personnel n’a pas à justifier de leur utilisation, encore moins à donner les noms de ses éventuels interlocuteurs, mais il devra indiquer la nature de ses activités : réunion préparatoire du CSE, rencontre avec des fournisseurs, entretien avec un salarié dans le cadre de son mandat, etc.

 

Élodie Sarfati
A savoir égal
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