Les congés payés décryptés : tout ce que vous devez savoir en tant qu’élu CSE

 

Parmi les missions clés du Comité Social et Économique (CSE), la défense des droits des salariés en matière de temps de travail et de repos occupe une place centrale. Dans ce cadre, la question des congés payés est incontournable. Bien que le principe des congés payés soit connu de tous, ses modalités d’application restent parfois floues, voire source de litiges.

En tant qu’élu du CSE, vous êtes un interlocuteur privilégié des salariés sur ces sujets. Vous devez donc maîtriser les règles essentielles, les possibilités d’aménagement, les droits liés aux absences, et les nouveautés jurisprudentielles récentes.

 

1. Le socle légal des congés payés

 

Le droit aux congés payés est consacré par le Code du travail à l’article L3141-1. Il s’agit d’un droit d’ordre public, auquel on ne peut déroger qu’en faveur du salarié.

Durée légale

  • 5 semaines par an pour un salarié à temps plein, soit 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif.
  • Les jours ouvrables sont comptés du lundi au samedi (hors dimanche et jours fériés).

Période de référence

  • En principe, la période d’acquisition court du 1er juin de l’année précédente au 31 mai de l’année en cours.
  • Certaines entreprises peuvent appliquer une autre période via accord collectif ou usage.

 

2. Le rôle du CSE dans la fixation et le suivi des congés payés

 

Même si l’employeur fixe les dates des congés, il doit respecter un certain formalisme, notamment en consultant le CSE.

 

Consultation CSE

 

L’article L2312-8 du Code du travail impose à l’employeur de consulter le CSE sur l’ordre des départs en congé, en tenant compte :

  • De la situation familiale des salariés.
  • De leur ancienneté.
  • De la possibilité de congés simultanés entre conjoints dans une même entreprise.
  • De l’activité saisonnière ou des contraintes de production.

Le CSE peut également intervenir lors :

  • De la définition de la période de prise des congés.
  • De la mise en place d’un compte épargne-temps (CET).
  • Des discussions sur les congés supplémentaires conventionnels ou d’ancienneté.

 

3. Les règles d’acquisition en cas d’absence

 

Certaines absences n’interrompent pas l’acquisition des congés. En tant qu’élu, vous devez savoir distinguer les cas où le salarié continue d’acquérir des jours de congés et ceux où il ne le peut pas.

 

Absences ouvrant droit à congés :

  • Arrêts maladie d’origine professionnelle (AT/MP).
  • Congés maternité/paternité/adoption.
  • Formation professionnelle.
  • Congés pour événements familiaux.

Cas particuliers (arrêts maladie non professionnels) :

Jusqu’à récemment, ces arrêts n’ouvraient pas droit à congés. Mais la jurisprudence européenne a obligé la France à revoir sa copie.

Loi du 22 avril 2024 (transposition de la jurisprudence européenne) :

  • Les congés sont désormais acquis pendant les arrêts maladie non professionnels, dans une limite de 4 semaines par an.
  • Les salariés peuvent reporter leurs congés jusqu’à 15 mois après leur retour, même en cas de longue maladie.

 

4. Les congés supplémentaires et usages d’entreprise

 

Le Code du travail pose un minimum, mais les accords collectifs et les usages peuvent accorder davantage :

  • Congés d’ancienneté (ex : 1 jour en plus après 5 ans d’ancienneté).
  • Congés pour événements familiaux élargis (décès de proches, déménagement, mariage d’un enfant, etc.).
  • Ponts accordés par l’employeur, souvent négociés en CSE.

Le CSE peut négocier ou revendiquer ces congés supplémentaires, notamment lors des NAO (Négociations Annuelles Obligatoires).

 

5. Cas particuliers à connaître

 

Fractionnement

  • Si le salarié ne prend pas ses 4 semaines de congé principal en continu entre le 1er mai et le 31 octobre, il peut bénéficier de jours de congés supplémentaires pour fractionnement, sauf s’il y renonce expressément.

Congés imposés

  • L’employeur peut imposer les dates de congés, avec un préavis minimum d’un mois, sauf en cas de fermeture annuelle de l’entreprise.

Fermeture de l’entreprise

  • En cas de fermeture imposée (notamment en août ou à Noël), le salarié est tenu de prendre ses congés sur cette période, même s’il ne les a pas encore tous acquis.

 

6. Droits du CSE en cas de litige ou de non-respect

 

En tant qu’élu CSE, vous êtes en droit :

  • D’alerter l’inspection du travail si les règles relatives aux congés ne sont pas respectées.
  • D’informer les salariés sur leurs droits et d’accompagner ceux qui rencontrent des difficultés.
  • De saisir le conseil de prud’hommes avec ou pour le salarié en cas de litige grave.

Le régime des congés payés, bien qu’encadré par la loi, reste souvent sujet à interprétation, ajustement ou négociation. En tant qu’élu du CSE, vous jouez un rôle essentiel dans la vigilance, la médiation et la proposition. Mieux vous maîtrisez les règles, plus vous êtes en mesure de défendre efficacement les droits des salariés, tout en contribuant à un climat social apaisé et équitable.