Index égalité professionnelle : « une habilitation à l’inertie » ?

Sommaire

Alors que le 1er mars prochain est la date limite de publication de l’index égalité pro, Le rapport du think tank Terra Nova pointe le risque d’une extinction du dialogue social sur cette thématique. Une bonne note à l’index pourrait représenter pour, les entreprises concernées, une « habilitation à l’inertie ».

 

index egalite professionnelle

Le calcul de l’index égalité professionnelle est une obligation pour les entreprises à partir de 50 salariés. Photo : Unsplash

Alors que plusieurs dispositions existaient déjà s’agissant de l’égalité professionnelle, le gouvernement a décidé, en 2018*, de créer un nouvel outil afin de passer d’une obligation de moyens – rarement respectée par les entreprises – à une obligation de résultats. Le danger selon Terra Nova*? En cas de bonne note, les entreprises pourraient être tentées d’oublier le reste de leurs obligations légales, notamment en matière de négociation collective sur l’égalité professionnelle.

 

 

 

 

__________________

Consulter les offres de formation Droit social pour les CSE

___________________

 

Index égalité pro. De l’obligation de moyens à l’obligation de résultats

 

Le 1er mars 2021, toutes les entreprises qui emploient 50 salariés et plus, devront calculer leur index de l’égalité professionnelle. Ce dernier prend la forme d’une note finale sur 100 points mesurée à partir des indices suivants : l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes, le pourcentage d’hommes et de femmes qui ont reçu une augmentation dans l’année, l’écart de répartition des promotions, le nombre de femmes au sein des fonctions dirigeantes et le nombre de salariées augmentées à la suite d’un congé maternité.

Si le score est inférieur à 75 points, alors les entreprises ont trois ans pour rectifier le tir, sans quoi elles se verront imposer des sanctions financières pouvant aller jusqu’à 1 % de la masse salariale annuelle.

Le but de la manœuvre est simple : faire que les dispositions préexistantes, auparavant peu investies par les entreprises (voir encadré), soient désormais appliquées. Car les entreprises craignent aussi le discrédit, l’index étant rendu public et largement relayé par la presse. Jusqu’ici, l’opération a plutôt été positive : la note globale moyenne est en effet passée de 83 en 2019 à 87 en 2020.

 

 

L’égalité homme-femme. Des dispositions peu appliquées jusqu’ici

 

Depuis la loi Roudy de 1983*, toutes les entreprises de plus de 50 salariés doivent mesurer chaque année l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes (écart global et par catégorie professionnelle) en amont d’une négociation sur l’égalité professionnelle.

Ces principes sont réaffirmés par la loi Guénisson de 2001* qui fait de la négociation collective le principal levier de la politique d’égalité entre les hommes et les femmes dans toutes les entreprises de plus de 50 salariés.

Pourtant, ces dispositions étaient jusqu’ici peu investies par les entreprises. Une étude de la Dares de 2018 dirigée par Sophie Pochic révèle que 60 % des entreprises, notamment des PME, ne respectaient pas cette obligation. (Source : rapport de Terra Nova*).

 

_____________________

Consulter les offres de formation Négociation collective

______________________

 

 

Le risque de l’index égalité pro : court-circuiter le dialogue social

 

L’un des avantages de ce nouvel index a été de mettre tout le monde d’accord sur la méthode. En effet, dans un rapport publié en janvier 2021, le think-tank Terra Nova indiquait qu’auparavant, lorsque « les écarts salariaux étaient calculés « les chiffres obtenus occasionnaient de vifs débats sur les modes de calcul », selon qu’il était décidé ou non, d’inclure, par exemple, les primes. L’index vient imposer une méthode commune par le biais d’un outil soumis à une obligation de publicité et composé d’indicateurs précis, tous affectés d’une pondération ».

Cependant, le rapport de Terra Nova souligne aussi que cet index est porteur d’un danger : celui de court-circuiter le dialogue social. En effet, « une bonne note pourrait inciter les entreprises concernées à se dispenser de la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle ». Or indique Kenza Tahri, l’autrice du texte, « la négociation […] doit se maintenir quelle que soit la note obtenue, et un plan d’action pour résoudre les écarts doit être mis à jour régulièrement, conformément aux obligations préexistantes, et ce même en l’absence de contrôles ».

 

 

 

Égalité professionnelle : un accord ou un plan d’action

 

Selon le code du travail, les entreprises d’au moins 50 salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l’employeur lorsqu’elles ne sont pas couvertes par un accord relatif à l’égalité professionnelle portant notamment sur les mesures visant à supprimer les écarts de rémunération, et la qualité de vie au travail ou, à défaut d’accord, par un plan d’action annuel établi par l’employeur et destiné à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (source : ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion*).

 

 

 

Lou-Eve Popper

 

 

*Loi Avenir Professionnel du 5 septembre 2018
* « L’Index de l’égalité professionnelle : occasion manquée ou outil prometteur ? », Terra Nova
*Loi n° 83-635 du 13 juillet 1983 portant modification du code du travail et du code pénal en ce qui concerne l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes
*Loi n° 2001-397 du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes
*L’égalité professionnelle Femme-Homme, ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion