« Cette certification, je la fais pour les élus qui viennent après moi » Joëlle, DS

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Joëlle Héry est à deux ans de la retraite, mais toujours militante active. Déléguée syndicale, elle veille à préparer le terrain pour les représentants des salariés qui vont lui succéder. Pour leur montrer que leur mission est utile et méritante, elle a choisi de préparer un certificat de compétences professionnelles avec le nouveau dispositif créé en juillet 2018 spécialement pour les mandatés.

Joelle certification animation de projet

Joëlle, employée à la Carsat est déléguée syndicale depuis dix ans. Elle a obtenu la certification « Assistance dans la prise en charge de projet ».

« Je veux montrer aux élus que c’est possible de valoriser tout ce que l’on apprend pendant les mandats. Avec la réforme des IRP et le CSE, ils vont galérer plus que moi jusqu’ici, car ils auront moins de moyens » estime-t-elle. L’expression en tant que salarié, c’est ce qui a toujours motivé Joëlle Héry. Son père, déjà, était militant syndicaliste sur les chantiers navals de Dubigeon à Nantes (devenu maintenant Groupe STX à Saint Nazaire). « Pour moi, le syndicalisme, c’est l’expression normale et logique d’un salarié dans une entreprise, affirme-t-elle avec conviction. On est acteur de la société, on est citoyen et pas simplement consommateur ! Dans la vie, on peut mener des combats et s’investir à tous les niveaux : l’entreprise, des associations, la défense de sa langue régionale, etc. »

« J’ai appris par moi-même, le droit du travail, à négocier, etc. »

Dès son entrée comme secrétaire à la Caisse régionale d’assurance retraite (Cram) en 1979, renommée la Carsat des Pays de la Loire, Joëlle Héry a donc souhaité « être actrice, donner son avis, des idées et prendre des initiatives ». D’abord élue au comité d’entreprise, puis comme déléguée du personnel, elle a ensuite été désignée déléguée syndicale. « Pour défendre les droits des autres salariés, j’ai appris par moi-même et par les formations syndicales, le droit du travail, les relations sociales, la négociation, etc. Ensuite, en tant qu’élue, j’ai eu l’occasion de prendre des responsabilités, de représenter le syndicat auprès de l’employeur, de négocier des protocoles d’accord (ex : travailleurs handicapés, pré-électoral, égalité hommes/ femmes, GPEC, QVT…..) de me documenter, etc. »

Une nouvelle voie de reconnaissance des compétences des mandatés

Cette fierté d’avoir bien défendu les droits et les conditions de travail de ses collègues, Joëlle Héry n’en a cependant pas eu vraiment de retour concret. Les mandatés ne reçoivent en effet que rarement des remerciements pour leur engagement. Du côté de son employeur non plus, elle n’a obtenu aucune évolution professionnelle. C’est pourquoi, quand le bureau du syndicat l’a informée sur le dispositif mis en place par l’Etat et l’Afpa pour accompagner les mandatés dans une nouvelle voie de reconnaissance de leurs compétences, elle s’est tout de suite portée candidate. Avec l’entretien réalisé avec une psychologue du travail de l’Afpa, Joëlle a déterminé que son profil correspondait à celui d’une assistante de direction (niveau bac+2) et qu’elle pouvait commencer par préparer le CCP d’« Assistance dans la prise en charge d’un projet ». Ensuite, place aux ateliers collectifs et au travail personnel.

« J’ai pris conscience de toute la richesse de mon travail »

Exigeante vis-à-vis d’elle-même et plutôt anxieuse face à l’organisation et au travail demandés, Joëlle Héry s’est investie pleinement dans le dispositif. « Les ateliers ont été un vrai révélateur. J’ai pu partager et échanger avec les autres mandatés candidats. Ça fait du bien de mettre sur le papier tout ce que l’on a acquis comme compétences. » Les cinq ateliers du dispositif consistent en effet en plusieurs étapes : lister les tâches réalisées au cours du ou des mandats ; dégager les compétences à valoriser au travers du CCP ; les illustrer et argumenter leur acquisition en prenant des situations vécues ; mesurer et compenser les éventuelles lacunes constatées ; démontrer que le mandaté est capable de transférer ces compétences acquises dans un poste de travail. Le résultat de ce travail de réflexion doit être présenté sous la forme d’un dossier de productions, présenté ensuite à un jury. « Au début, il a été difficile de prendre du recul sur tout ce que l’on fait au quotidien. Ce n’est pas évident non plus de parler à la première personne. On a plutôt tendance à dire « nous », à s’exprimer pour et par le collectif. Puis, à force de creuser, j’ai pris conscience de toute la richesse de mon travail et que les responsabilités que j’endosse correspondent au final plus à celles d’un cadre ! » raconte la mandatée, que les ateliers ont aidé à reprendre confiance en elle.

Obtenir ce certificat : une fierté, une revanche et un message militant

Après près de deux mois de réflexion, de travail collectif et individuel, d’un accompagnement avec des conseillers de l’Afpa et de recherches personnelles, Joëlle Héry a bouclé son dossier écrit et passé l’examen oral. Le jury était composé d’un professionnel et d’un mandaté. Son certificat en main, elle est fière du parcours accompli, « pour les autres », mais aussi comme une revanche : « Je vais pouvoir montrer mon diplôme à mon DRH et lui dire : ‘’Regardez ce que vous avez perdu comme compétences en me mettant au placard !’’ ». Par cette victoire personnelle, Joëlle Héry, proche de la retraite, veut ainsi transmettre aux autres élus un message militant : « Ne lâchez jamais, allez de l’avant, toujours en pensant aux autres. Au travers des mandats, on élargit son champ de connaissances, on découvre beaucoup de choses et on porte un autre regard sur l’entreprise et sur le monde. Alors engagez-vous, formez-vous et groupez-vous pour défendre vos intérêts ! »

Philippine Arnal-Roux

 

Fiche d’identité :

Entreprise : Carsat
Age : 60 ans
Fonction : secrétaire
Mandat actuel : déléguée syndicale
Temps en mandat : 75 %
Objectif :
CCP obtenu : Assistance dans la prise en charge d’un projet
CCP équivalent : Assister un dirigeant dans la prise en charge d’un projet
Il lui reste à valider les CCP :
« Gérer le traitement, l’organisation et le partage de l’information » et
« Assister au quotidien un dirigeant et faciliter sa prise de décision » (CCP sans équivalence pour les mandatés)
pour obtenir le titre professionnel de niveau III (bac +2): Assistant de direction