179 000 euros obtenus en justice par un représentant du personnel discriminé

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L’activité syndicale d’un salarié ne doit en aucun cas lui porter préjudice, que ce soit en matière de rémunération, d’accès à la formation ou encore de déroulement de carrière. Dans le cas d’un représentant du personnel discriminé, l’employeur peut se voir condamner à payer des réparations conséquentes.

 

La discrimination syndicale est une réalité dans les entreprises : 46 % des syndiqués disent même en avoir déjà été victimes ! Pourtant, la loi sanctionne lourdement ce type de comportement.

 

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L’activité syndicale : un critère de discrimination prohibé

discrimination au travail

Si le juge constate un préjudice de discrimination syndicale, l’employeur devra le réparer intégralement… Photo : Unsplash

L’activité syndicale fait partie des critères de discrimination (au même titre que l’âge, l’orientation sexuelle, l’état de santé…) prohibés par la loi et l’article L 1132-1 du code du travail. Autrement dit, l’employeur ne peut pas se fonder sur ce critère pour prendre des décisions en matière de recrutement, de rémunération, de promotion, d’accès à la formation, de classification, de sanction disciplinaire, etc. S’il le fait, et que le juge reconnaît une discrimination, il devra réparer intégralement le préjudice causé au salarié. Un préjudice qui peut rapidement chiffrer.

C’est ainsi que dans un arrêt du 19 décembre 2019, la cour d’appel de Versailles a condamné une entreprise à réparer le préjudice financier subi par un représentant du personnel depuis 2006, date à laquelle il a commencé à exercer son mandat. Montant de l’ardoise : 179 000 euros. Le salarié estimait avoir été pénalisé dans son déroulement de carrière du fait de son activité syndicale. Il avait comparé sa situation avec celle d’un panel de 28 de ses collègues, embauchés à la même période et au même niveau de classification que lui. Il en était ressorti une évolution de carrière « nettement moins favorable » selon les juges, qui ont estimé cette situation discriminatoire, dès lors que l’employeur n’avait pas pu prouver le contraire.

À l’employeur de prouver l’absence de discrimination

En matière de discrimination, la charge de la preuve est aménagée. En effet, le salarié (ou candidat à un emploi) qui s’estime discriminé doit présenter au juge civil « des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination ». L’employeur doit ensuite « prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ».
A partir de ces éléments, « le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles » (article L 1134-1 du code du travail). Le juge peut ainsi ordonner à l’employeur de communiquer des éléments, y compris nominaux, tels que la rémunération, la date d’embauche, l’évolution de carrière, etc. permettant de comparer la situation du salarié avec celle d’autres salariés de sa catégorie.

 

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Réparation intégrale du préjudice de discrimination

Le préjudice lié à une discrimination doit être « intégralement réparé ». Autrement dit, le salarié doit être placé dans la situation qui aurait été la sienne si la discrimination n’avait pas eu lieu. Appliquant ce principe, les juges ont reconstruit la carrière du salarié en le positionnant à des niveaux de classifications rehaussés, et en recalculant son salaire en conséquence, sur une période allant de 2006 à 2018. D’où le montant élevé des rappels de salaire que l’employeur doit lui verser, et qui tiennent compte non seulement des parts fixes et variables du salaire, mais aussi des primes d’intéressement et de participation qui auraient dû être perçues dans cette période, et du préjudice subi en matière de retraite. La cour d’appel a également décidé que le salarié devait bénéficier de la moyenne des augmentations individuelles et collectives perçues par les salariés de sa catégorie à compter d’août 2018.

 

Élodie Sarfati
À savoir égal
Agence de digital learning en social-RH

 

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