Quand et comment mobiliser le droit d’alerte économique ?

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À l’heure de la crise sanitaire, nombre d’élus peuvent nourrir des inquiétudes sur la situation économique de leur entreprise. S’ils peinent à obtenir des informations de l’employeur, ou s’ils craignent, par exemple, que certaines décisions la fragilisent et affectent l’emploi, ils ont à leur disposition un outil juridique leur permettant de tirer le signal d’alarme : le droit d’alerte économique. Comment et pourquoi l’actionner ?

 

Lorsque le CSE d’une entreprise de 50 salariés et plus « a connaissance de faits de nature à affecter de façon préoccupante la situation économique de l’entreprise », et qu’il estime que l’employeur doit lui fournir des explications (article L2312-63 du code du travail), il peut déclencher un droit d’alerte économique.

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Quand les élus CSE s’inquiètent sur la situation de l’entreprise, ils peuvent déclencher le droit d’alerte économique. Photo : Unsplash

Ces « faits préoccupants » peuvent être de nature très différente : difficultés de trésorerie, perte d’un gros client, fusion ou montage financier problématique, contentieux fiscal, conséquences d’une nouvelle législation, décision stratégique de la maison-mère, déficit répété, etc. Dans un arrêt de 2018, la cour de cassation a validé la procédure du CSE déclenchée par le projet de la direction de dénoncer les accords collectifs applicables dans l’entreprise.

 

Les élus n’ont pas à justifier leurs inquiétudes, ni à en révéler la source, mais devront toutefois être en capacité d’apporter des faits objectifs en cas de contestation de l’employeur devant le tribunal.

Attention, dans les entreprises à établissements multiples, seul le CCE peut décider de recourir à cette procédure, quand bien même les faits qui justifient le droit d’alerte ne concernent qu’un seul établissement.

 

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Le droit d’alerte économique, une procédure en trois temps

Dans un premier temps, la demande d’explications est inscrite, de plein droit, à l’ordre du jour de la prochaine séance du CSE. Au cours de cette réunion, l’employeur répond aux questions qui lui auront été transmises au préalable par les élus : chiffres précis, mesures prises ou envisagées, prévisions, etc.

Si les élus jugent que les explications de l’employeur sont insuffisantes, ou s’ils sont confirmés dans leurs craintes, la commission économique du CSE (ou le CSE directement, si elle n’existe pas) établit un rapport transmis à l’employeur et au commissaire aux comptes. Ce rapport va servir à mesurer l’ampleur des difficultés et à formuler des propositions.

Pour finir, au vu des éléments du rapport, les élus peuvent décider de saisir les organes de contrôle de la société (conseil d’administration ou de surveillance, associés…) qui doivent apporter une réponse motivée à ses questions et recommandations. La procédure d’alerte a donc des effets à tous les niveaux de l’entreprise.

 

 

 

Droit d’alerte. Quels sont les moyens du CSE ?

Pour établir ce rapport, le CSE ou sa commission économique, dispose d’un certain nombre de moyens :

  • Il peut se faire assister d’un expert-comptable. Celui-ci est pris en charge par l’employeur (à 80 %) et par le CSE (à 20 %). Le CSE ne peut pas déclencher d’expertise pour droit d’alerte plus d’une fois par exercice comptable.
  • Il peut s’adjoindre l’aide de deux salariés de l’entreprise, choisis pour leurs compétences en-dehors du CSE. Ces salariés disposent d’un crédit de cinq heures.
  • Les élus peuvent convoquer le commissaire aux comptes.

 

L’importance de s’accorder sur l’objectif du droit d’alerte économique

En période de crise sanitaire et économique, les élus pourront s’interroger sur l’opportunité de déclencher un droit d’alerte. Il peut apparaître bien illusoire de demander des gages pour l’avenir lorsque la situation évolue au jour le jour. L’intérêt de la démarche pourra donc s’avérer limité, si l’employeur n’est objectivement pas en mesure d’apporter de réponses satisfaisantes aux élus. Pour autant elle pourra s’avérer utile si le dialogue avec la direction est défaillant, si les élus ont le sentiment que des éléments sont passés sous silence, ou que les décisions prises par l’entreprise, voire sa maison-mère, sont porteuses de risques pour sa pérennité ou l’emploi.

 

 

Élodie Sarfati
À savoir égal
Agence de digital learning spécialisée en social et RH