Alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes : temps décompté du crédit d’heures de délégation

Le temps passé par les élus pour l’exercice du droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes est-il considéré comme du temps de travail effectif ou imputé du crédit d’heures ? La Cour de cassation a répondu à cette question dans son arrêt du 9 novembre 2022.

temps d'enquête décompté du temps de délégation

Crédit : Freepik

Un élu du CSE souhaitant exercer son droit d’alerte doit informer l’employeur de la situation constatée ou de la situation telle que présentée par le salarié. Cette information peut être réalisée par tout moyen et à tout moment. Il n’est pas nécessaire qu’elle soit réalisée au cours d’une réunion plénière. Il est recommandé de conserver une trace écrite de cette information.

C’est ensuite à l’employeur de prendre en compte l’alerte et de procéder à une enquête sans délai, conjointe avec l’élu du CSE auteur de l’alerte.

En l’espèce, les élus du CSE ont exercé ce droit d’alerte pour atteinte aux droits des personnes en raison d’une discrimination à l’encontre d’une femme enceinte.

Des membres du CSE ayant participé à la réunion avec l’employeur ont saisi le conseil de prud’hommes afin qu’il condamne ce dernier à leur payer le temps passé à la réunion, comme temps de travail effectif, sans qu’il soit déduit de leurs heures de délégation.

La demande aboutit devant la Cour d’appel de Paris, qui a jugé que ce temps devait être considéré comme du temps de travail effectif, ne pouvant être déduit du temps de délégation des membres du CSE dans la mesure où « l’atteinte aux droits des personnes constituant une situation d’urgence et de gravité, de sorte que des mesures préventives aient pu être prises ».

La Cour de cassation a tranché concernant le décompte du temps passé à mener l’enquête en cas d’atteinte aux droits des personnes.

Elle casse et annule la décision de la Cour d’appel. Les cas pour lesquels le temps passé par les élus du CSE est rémunéré comme temps de travail effectif sont strictement définis par l’article L. 2315-11 du code du travail :

« Est également payé comme temps de travail effectif le temps passé par les membres de la délégation du personnel du comité social et économique :

1° A la recherche de mesures préventives dans toute situation d’urgence et de gravité, notamment lors de la mise en œuvre de la procédure de danger grave et imminent prévue à l’article L. 4132-2 ;

2° Aux réunions du comité et de ses commissions, dans ce cas dans la limite d’une durée globale fixée par accord d’entreprise ou à défaut par décret en Conseil d’Etat ;

3° Aux enquêtes menées après un accident du travail grave ou des incidents répétés ayant révélé un risque grave ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave ;

Ce temps n’est pas déduit des heures de délégation prévues pour les membres titulaires de la délégation du personnel du comité social et économique. »

Or l’exercice du droit d’alerte en cas d’atteinte aux personnes n’est pas mentionné expressément dans ledit article et ne peut s’analyser en une situation d’urgence et de gravité.

La Cour de cassation fait une appréciation stricte de l’article L. 2315-11 du code du travail, elle en déduit donc que ce temps s’impute de leur crédit d’heures.

_______________

Consulter les offres de formation du CSE

_______________

Sources

C.trav., art. L. 2312-59 (alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes)

C.trav., art. L. 2315-11 (temps assimilés à du temps de travail effectif)

Cass.soc.9 novembre 2022 n° 21-16.230

Article rédigé par Elodie Mathez, juriste-formatrice en Droit Social