Défense des salariés : que prévoient les candidats à la présidentielle ?

Pour qui allez-vous voter en tant qu’élu du personnel ? Nous vous proposons un rapide tour des programmes des deux candidats  la présidentielle, centré sur les sujets qui vous intéressent : la représentation du personnel et la défense des droits des travailleurs.

propositions des candidats à la présidentielle pour la défense des salariés et les élus du personnel

Saisie d’écran France Info.

Votre mandat a un rôle essentiel dans la société française et dans le fonctionnement des entreprises. Marine Le Pen et Emmanuel Macron ont-ils bien pris la mesure de l’importance de la défense des salariés et de la préservation de vos missions ?

Les programmes officiels de Marine Le Pen et d’Emmanuel Macron,
commentés avec la collaboration de Cédric Huillet, gérant de l’organisme de formation Huillet Formations.

MARINE LE PEN

Propositions officielles Commentaires et questionnements
1.
Pour favoriser l’embauche :
– réduire le nombre des obligations administratives liées au seuil social de 50 salariés – fusionner les institutions représentatives du personnel (IRP) entre 50 et 300 salariés (hors représentation syndicale) en une structure unique conservant les mêmes compétences.
> Cela veut-il dire : réduire les obligations des employeurs envers les élus du personnel et les salariés ? Pas plus de détails.> Existe déjà : La loi du 20 décembre 1993 a créé la DUP ou délégation unique du personnel pour regrouper le CE et les DP dans les entreprises de 50 à 200 salariés. La loi Rebsamen a permis de la mettre en place dans les structures jusqu’à 300 salariés.« Au-delà, on peut se demander si les prérogatives des DUP seront maintenues ou réduites ».
2. -Fixer l’âge légal de la retraite à 60 ans avec 40 annuités de cotisations pour percevoir une retraite pleine.
3. Retirer la Loi Travail > En totalité ? partiellement ?
Quelles conséquences pour les mesures déjà en place, plutôt en faveur des IRP : la formation des DP ; des acteurs de la négociation collective par exemple, le CPA ? Pas plus de détails.
4. – Maintenir la durée légale hebdo. du travail à 35 h.
– Autoriser la négociation sur l’allongement du temps de travail exclusivement au niveau des branches professionnelles et à la condition d’une compensation salariale intégrale (37 heures payées 37 ou 39 heures payées 39)
5. Défiscaliser les heures supplémentaires et maintenir leur majoration « Si l’accord de branche a fixé une durée du travail supérieure à 35 h (voir ci-dessus) les heures au-delà de 35 seront-elles des heures supplémentaires ou des heures payées au taux normal ? »
6.
Abaisser les charges sociales des TPE-PME de façon lisible et significative en fusionnant l’ensemble des dispositifs d’allègement des charges sociales de manière dégressive (intégration du CICE, transformé en allègement de charges).
Cet allègement de charges sera conditionné au maintien de l’emploi.

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Dans quelles mesures ?« Est-ce que toute forme de rupture de contrat entraînera une suspension des allégements ou s’agit-il de maintenir globalement le stock d’emplois ? Quid des PSE validés par l’administration ? Seront-ils sanctionnés ? »
7. Créer un dispositif « premier emploi » qui exonère totalement de charges la première embauche d’un jeune de moins de 21 ans par une entreprise et ce pour un délai maximum de deux ans. > Des aides à l’embauche existent déjà, notamment :
– une prime pendant 2 ans
– une exonération de cotisation patronale : pas uniquement pour « la 1ère embauche » mais pour tout jeune de moins de 26 ans ; pendant 3 ou 4 mois sous condition d’embauche après la période d’essai.
8.– Supprimer sur notre territoire la directive « détachement des travailleurs » qui y crée une concurrence déloyale inadmissible. Mettre en place une taxe additionnelle sur l’embauche de salariés étrangers afin d’assurer effectivement la priorité nationale à l’emploi des Français. 
« Pour la seconde partie de cette proposition, on peut s’interroger sur sa réalisation : sa constitutionnalité et son adéquation avec les traités européens »
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9.
promouvoir la laïcité et lutter contre le communautarisme. Inscrire dans la Constitution le principe : « La République ne reconnaît aucune communauté ». Rétablir la laïcité partout, l’étendre à l’ensemble de l’espace public et l’inscrire dans le Code du travail.
« Si par laïcité on entend la liberté de croire et d’exprimer ses opinions religieuses dans la limite des droits des autres et des contraintes spécifiques de l’entreprise, alors c’est déjà le cas via la Loi (L.1121-1 du code du travail) et les dernières jurisprudences françaises et européennes. Si l’utilisation de la laïcité vise à supprimer tout droit à liberté de croyance et de conscience, alors cette disposition risque de rentrer en confrontation avec la Loi de 1905, la constitution et les derniers arrêts de la Cour de Justice de l’Union Européenne ».
10.
développer massivement l’alternance (contrat d’apprentissage, contrat de professionnalisation) dans l’artisanat, le secteur public et privé et rendre la formation professionnelle plus efficace, moins opaque et moins coûteuse.
> La formation professionnelle et l’apprentissage relèvent de la compétence des Régions qui ont chacune mené depuis plus de 10 ans des chantiers prioritaires dans ce sens.

EMMANUEL MACRON

Propositions officielles Commentaires et questionnements
Objectif 1 : Nous simplifierons le droit du travail « Simplifier ou déréglementer ? Il y a une différence fondamentale entre rendre les règles plus lisibles afin de sécuriser les entreprises et supprimer des règles et des contraintes qui pèsent sur les employeurs mais qui protègent les salariés ».
– Négocier au plus près du terrain, avec la primauté des accords d’entreprise sur les accords de branche, tout en conservant le socle de règles qu’est le Code du travail.
Tout accord d’entreprise résultera soit d’un accord majoritaire avec les syndicats, soit d’un référendum à l’initiative de l’employeur ou des syndicats sur la base d’un accord minoritaire. C’est seulement à défaut d’accord d’entreprise que la branche interviendra.
> La loi Travail instaure déjà la primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche, ainsi que le recours au référendum pour les questions relatives  la durée du travail, aux repos et aux congés.« Jusqu’où pourra aller la primauté de l’accord d’entreprise ? Les salaires, l’égalité professionnelle, la santé au travail, les droits à la formation ? »
– Les projets de réforme structurelle comme l’assurance-chômage seront discutés au niveau national avec les organisations syndicales et d’employeurs. > Négociation au niveau national : « est-ce une manière d’annoncer la fin de la gestion paritaire de l’assurance chômage, qui serait transférer à l’Etat, avec un simple rôle consultatif des organisations syndicales patronales et salariés ? »
Une instance unique de représentation reprenant l’ensemble des attributions des comités d’entreprises, délégués du personnel et CHSCT sera mise en place dans toutes les entreprises et tous les groupes sans limitation de plafond, sauf accord d’entreprise visant à maintenir les instances existantes ou à en créer de nouvelles > Fusion des IRP : « La question des moyens alloués, du nombre de représentants minimum et des prérogatives maintenues va devenir essentielle. Fusion à droit constant ou fusion avec perte de pouvoirs ? »
Objectif 2 :
Nous renforcerons les partenaires sociaux
Renforcer la formation des représentants des salariés. Au-delà des compétences en droit social, ces formations porteront sur les enjeux de la gestion d’une entreprise, pour que syndicats et employeurs se comprennent mieux et aboutissent à des solutions communes. > De quelle manière ? Avec quels moyens ? Financés par qui ?> Et la formation des dirigeants et des managers au dialogue social ?
-Nous permettrons à chaque salarié d’apporter des ressources financées par l’employeur au syndicat de son choix. Nous encouragerons l’engagement syndical, la reconnaissance de celui-ci dans les carrières au sein des entreprises et nous lutterons contre la discrimination syndicale. > En clair : création d’un chèque syndical. > Comment encourager l’engagement syndical ?> La Loi Rebsamen notamment mais aussi des dispositions générales du Droit du travail) et cas de jurisprudence encadrent déjà la discrimination syndicale.
Objectif 3 :
assurance-chômage
– Droits à l’assurance-chômage ouverts aux salariés qui démissionnent une fois tous les 5 ans. L’Etat pilotera le système d’assurance-chômage, en accord avec les partenaires sociaux > Dans quelles conditions ?
Couverture de tous les actifs : salariés, artisans, commerçants, indépendants, entrepreneurs, professions libérales, agriculteurs. > Quel financement ? « Quelles indemnités ? Avec une cotisation chômage donc une hausse des prélèvements sociaux ? »
Contrôle accru de la recherche d’emploi par Pôle emploi.
Bilan de compétences proposé à chaque nouveau demandeur d’emploi.
– A partir de deux emplois « décents » refusés : allocations suspendues.
> Contrepartie du point précédent.> Quels moyens supplémentaires pour Pôle Emploi : contrôles, bilan de compétences ?
« Comment définit-on une offre décente ? A partir de quelle perte de salaire, de quelle augmentation des contraintes (distance, temps, qualification) un chômeur sera-t-il en droit de dire ‘merci mais non merci’ ? »
Suppression des cotisations salariales sur la maladie et l’assurance chômage.
Hausse de la CSG de 1,75 point excepté pour les chômeurs et retraités modestes.
> La hausse de la CSG étant inférieure à la baisse des cotisations, il en résultera un gain de pouvoir d’achat pour les salariés.
– La plupart des contributions actuelles des entreprises pour la formation sera progressivement converti en droits individuels à la formation pour les actifs, à utiliser directement auprès des prestataires de formation > Des précisions ? « Il semblerait que cela signifie une fin de la gestion paritaire de la formation (par les Opca) donc de la mutualisation des fonds et donc d’une gestion directe entre l’entreprise et le centre de formation. A confirmer ».
– Création d’un code du travail digital pour les PME, d’un site reprenant les obligations légales et conventionnelles. Les réponses fournies en ligne seront opposables à l’administration. « Une mesure simple, sans réel coût, et avec un effet sur le quotidien des PME, TPE et artisans/commerçants n’ayant pas les moyens de se payer les conseils d’un spécialiste. Il faudra par contre, que cette plateforme soit particulièrement bien conçue, facile d’accès, adaptée à un public non spécialiste… et actualisée en permanence. »
Exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires.
– Instauration d’un plafond et d’un plancher pour les indemnités prud’homales pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (hormis les cas de discrimination, de harcèlement, etc.). > Quelles seront les exceptions ? « Un plafond indicatif est déjà fixé par l’article D.1235-21 du Code du travail. Le barème obligatoire sera-t-il identique ? Si oui, cela constitue une baisse par rapport aux moyennes des indemnités accordées selon les études du Ministère de la Justice. »
Les employeurs abusant des contrats courts seront frappés d’un malus sur les cotisations chômage, pour l’instant indéfini, tandis que les vertueux auront un bonus. > Quelles conditions ?
– Egalité professionnelle et salariale dans les grandes entreprises : contrôles aléatoires, imprévus et à grande échelle par le Défenseur des Droits. Résultats rendus publics. > Et dans les PME ?

Philippine Arnal-Roux
avec l’aimable collaboration de Cédric Huillet.
Une présentation des programmes des deux candidats à l’élection présidentielle française a été faite à une cinquantaine d’élus du personnel lors d’une matinée du Toit Citoyen, par Cédric Huillet, en partenariat avec CE Consultant.

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